Facultés affaiblies et travail : un dossier à suivre

En octobre 2018, le Canada devenait un des premiers pays au monde à légaliser le cannabis à usage récréatif. Au moment de la légalisation, de nombreux employeurs se demandaient si tout ne s’était pas passé un peu trop rapidement. Le tapage médiatique autour du manque de fiabilité des tests de dépistage disponibles a également contribué à alimenter les craintes de dérapages en milieu de travail. Maintenant que la poussière est retombée, quelles leçons pouvons-nous tirer de ce qui s’est passé au cours des douze derniers mois? 

D’abord, bien qu’il s’agisse d’un changement législatif et social important, force est de constater qu’il n’y a pas eu de catastrophe dans la rue ou dans les milieux de travail en général. La grande majorité des travailleurs a continué de se comporter de façon responsable et à se présenter au travail sans avoir les facultés affaiblies par l’alcool, les drogues ou toute autre cause. En effet, les gens semblent avoir bien compris un concept assez simple : le fait que le cannabis récréatif soit désormais légal ne donne pas le droit de se présenter au travail avec les facultés diminuées par cette substance. 

La légalisation a néanmoins eu pour effet de sensibiliser un grand nombre d’entreprises à l’importance de se doter de politiques bien ficelées en matière de facultés affaiblies au travail. En plus et de manière concomitante à la légalisation, la jurisprudence est venue baliser certaines limites relativement à ces politiques, notamment dans les milieux de travail à haut risque pour la santé et la sécurité des travailleurs. Cela a donc inspiré plusieurs employeurs à raffiner leur approche en la matière, par exemple en exigeant que les employés aux prises avec des problèmes de dépendance dénoncent leur situation sans délai et avant la survenance de tout incident, moyennant l’engagement de leur employeur à les accommoder dans leur processus de réhabilitation. 

Certaines questions restent toutefois en suspens pour l’instant. Pensons, entre autres, à la difficulté d’établir un lien entre les traces de cannabis détectées chez un employé et les effets potentiels de la drogue sur ses aptitudes au travail. Avec l’avènement des produits comestibles à base de cannabis sur le marché à l’automne 2019, beaucoup espèrent que la science entourant le dépistage se développe aussi rapidement que l’industrie du cannabis récréatif! 

Les entreprises canadiennes et québécoises ont donc tout intérêt à suivre les prochains développements sur le sujet, autant sur le plan législatif que scientifique. En attendant, il est évidemment prudent de se doter d’une bonne politique sur les facultés affaiblies au travail et de se réserver la possibilité de la modifier au fil des changements à venir.

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