Accident de travail mortel : un tribunal ontarien impose une peine de prison de 3 ½ ans à un directeur de projet

Le 11 janvier 2016, la Cour supérieure de l’Ontario a imposé une peine d’emprisonnement de 3 ½ ans à un directeur de projet reconnu coupable de négligence criminelle suite à la mort de quatre travailleurs en 20091.

Les faits

Le 24 décembre 2009, Metron Construction Corp. procédait à la réfection des balcons d’un édifice de plusieurs étages. Pour accéder aux balcons, un échafaudage suspendu était utilisé. Lorsque vint le temps de quitter le chantier, six travailleurs ont utilisé l’échafaudage suspendu à partir du 13e étage, lequel s’est effondré quelques instants plus tard. Quatre travailleurs sont décédés et un cinquième a été sévèrement blessé.

Les autorités ont porté des accusations de négligence criminelle à l’encontre de Metron Construction Corp. ainsi qu’à l’encontre de M. Vadim Kazenelson, le directeur de projet de l’entreprise.

En juillet 2012, Metron Construction Corp. a plaidé coupable à un chef de négligence criminelle causant la mort. Initialement condamnée à une amende de 200 000 $, l’entreprise a finalement été tenue de payer 750 000 $ par la Cour d’appel de l’Ontario. Des amendes totalisant 90 000 $ ont aussi été imposées en vertu de l‘Ontario Health and Safety Act.

Le 26 juin 2015, le directeur de projet a été reconnu coupable de quatre chefs de négligence criminelle causant la mort et d’un chef de négligence criminelle causant des lésions corporelles2.

Le juge MacDonnell de la Cour supérieure de l’Ontario a retenu que M. Kazenelson était une personne qui supervise un travail au sens de l’article 217.1 du Code criminel et que, de ce fait, il avait l’obligation de prendre les mesures voulues pour éviter qu’il n’en résulte des blessures corporelles pour autrui, même s’il y avait un superviseur des travailleurs sur le chantier.

De plus, la Cour a conclu qu’il avait fait preuve d’insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité des travailleurs:

  • il connaissait le manque de dispositifs de protection antichute pour tous les travailleurs présents;
  • il a permis aux travailleurs de monter sur la plate-forme suspendue, alors qu’il savait qu’ils n’étaient pas protégés contre les chutes.

Le juge reconnaît qu’une violation d’une règlementation SST ne constitue pas automatiquement une violation de l’article 217.1 du Code criminel : cela peut toutefois aider à identifier les mesures qu’une personne visée par l’article 217.1 du Code criminel doit prendre pour éviter des blessures en milieu de travail.

Dans son jugement sur la peine, le Tribunal souligne la nécessité d’imposer une peine d’emprisonnement d’une durée significative pour rappeler aux personnes en autorité dans des milieux de travail potentiellement dangereux qu’ils ont le devoir de prendre toutes les mesures raisonnables pour veiller à la sécurité des travailleurs.

Conclusion

Il sera très certainement intéressant de suivre l’évolution de ce dossier puisque le jugement relatif à la déclaration de culpabilité a été porté en appel.

Cette affaire rappelle l’importance pour les dirigeants et les superviseurs de porter une attention toute particulière aux règles en matière de santé et de sécurité au travail et qu’advenant un manquement à cet égard, les conséquences peuvent être très importantes.


1 Voir la décision 2016 ONSC 25.
2 Voir la décision 2015 ONSC 3639.

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