L’impact de la crise de la COVID-19 sur les baux commerciaux : les clauses importantes à examiner par les parties

Alors que le monde traverse une période de crise sans précédent, de nombreuses entreprises voient leur capacité d’exécuter leurs obligations contractuelles être compromise. Cette crise a déjà des conséquences majeures sur l’économie mondiale et le secteur immobilier ne sera certainement pas épargné. En outre, les impacts que la crise aura sur les locataires et les propriétaires ne feront que sévir et s’accentuer avec l’écoulement du temps. 

Bien que tous les baux soient uniques et que leur interprétation puisse varier selon les clauses qui y sont contenues, la crise de la COVID-19 demandera certainement aux bailleurs et aux locataires d’être créatifs et de faire preuve de flexibilité afin d’assurer la pérennité de leurs entreprises. Ainsi, il importe, tant pour les locataires que les propriétaires immobiliers, de réviser les termes de leur bail commercial afin d’élaborer la meilleure stratégie qui leur permettra de traverser cette crise, et ce, dans le respect des droits et obligations qui résultent de cette entente contractuelle. 

Il est important pour les parties d’établir rapidement un dialogue sur leurs obligations respectives pendant et après la crise afin, par exemple, d’éviter une cascade de fermetures d’entreprises pour les commerçants, ce qui engendrerait une augmentation trop importante du taux d’inoccupation dans les différents centres commerciaux ou immeubles à vocation commerciale. 

Considérant ce qui précède, voici quelques clauses importantes à considérer dans l’analyse d’un bail en temps de crise : 

1. La clause de force majeure 

Les baux commerciaux prévoient généralement une clause de force majeure. Celle-ci peut, par exemple, contenir une énumération des événements qui pourraient constituer, ou non, un cas de force majeure ainsi que les conséquences de ces événements sur les droits et obligations des parties au bail. Il est impératif de consulter cette clause lorsqu’une partie souhaite s’en prévaloir et de bien l’analyser puisque celle-ci peut varier d’un bail à l’autre. 

Pour que la crise actuelle découlant de la COVID-19 constitue une force majeure, la partie qui l’invoque doit démontrer qu’elle n’a pas pu en éviter les conséquences, même en agissant avec prudence et diligence. En effet, tel n’est pas toujours le cas. Au surplus, il importe de souligner qu’une clause de force majeure ne libère pas nécessairement le locataire de toutes ses obligations, par exemple celle de payer le loyer. 

Seule une analyse des circonstances particulières de chaque cas permettra de déterminer la teneur de cette clause et son impact. 

2. La clause de frais d’exploitation

Dans l’éventualité où la clause de force majeure oblige expressément le paiement du loyer ou si la COVID-19 ne se qualifie pas à titre de force majeure, les parties à un bail pourraient aussi se tourner vers la clause de frais d’exploitation pour déterminer leurs droits et obligations, et possiblement moduler les paiements de loyer. 

Cette clause prévoit habituellement le paiement, par le locataire, d’un montant de loyer additionnel, en sus du loyer de base, pour l’entretien, l’exploitation et les réparations d’un immeuble. De manière générale, le montant payable correspond à la dépense réelle du bailleur, en plus des frais d’administration, et est habituellement divisé au prorata de la surface occupée par chaque locataire de l’immeuble. Cette clause peut permettre de diminuer la pression financière qui repose sur les locataires dans le contexte de la pandémie, sans pour autant avoir des répercussions sur les obligations du bailleur auprès de ses prêteurs. À ce titre, le bailleur pourrait décider, dans les limites de ce que la clause prévoit, de reporter certains travaux originellement prévus ou de minimiser ses dépenses autrement imputables aux locataires, étant donné la diminution de ses activités. De même, les mesures du gouvernement permettant un report des paiements de taxes, d’hypothèques et d’électricité peuvent avoir un impact sur le loyer additionnel payable pendant la pandémie. 

À la fin de l’année financière du bailleur, la comptabilité de celui-ci afin d’émettre l’ajustement de loyer additionnel normalement prévu au bail devra faire l’objet d’une facturation précise et détaillée, notamment pour les mois de la pandémie. 

3. La clause d’exploitation continue 

Outre le paiement du loyer, une obligation capitale dans plusieurs baux commerciaux se trouve dans la clause d’exploitation continue. Souvent utilisée dans les baux de centres commerciaux, celle-ci prévoit généralement, sous peine de résiliation, dommages-intérêts ou de recours à l’injonction, que le locataire doit exploiter ses locaux de manière continue et selon l’horaire établi par le bailleur de temps à autre. 

Le locataire a d’abord et avant tout l’obligation de se conformer au cadre législatif applicable, incluant les directives gouvernementales de fermer toutes les entreprises dites « non-essentielles ». Cette situation aura nécessairement un impact sur la mise en œuvre des clauses d’exploitation continue. 

Pour les entreprises dont les liquidités sont plus faibles, l’impact de cette clause pourrait se faire ressentir lorsque le gouvernement redonnera le feu vert aux commerces. En effet, si un locataire ne peut financièrement continuer l’exploitation de son entreprise de manière complète et continue, selon les exigences du bailleur après la crise, il pourrait potentiellement se retrouver en défaut en vertu de son bail. 

4. La clause de taxes municipales 

L’importance de cette clause est souvent sous-estimée, surtout d’un point de vue financier. Or, il est évident que la crise actuelle aura une incidence sur la valeur des propriétés. Toutefois, il faudra un certain temps avant de pouvoir connaître l’ampleur de l’impact de la COVID-19 sur le marché immobilier dans la province. 

Par conséquent, il importe de consulter cette clause et d’évaluer l’opportunité de demander la révision – puis potentiellement entreprendre un recours en contestation – de la valeur portée au rôle d’évaluation municipal pour un immeuble soit à titre de propriétaire, soit de locataire. 

5. La clause de défaut et de résiliation 

La clause de défaut énumère généralement les cas de défaut prévus au bail ainsi que les démarches devant être entreprises pour obtenir la résiliation du bail. 

Encore une fois, la teneur de cette clause pourra varier d’un bail à l’autre et l’analyse de celle-ci est cruciale avant d’entreprendre un recours judiciaire afin de s’assurer que l’on se conforme aux obligations prévues au bail. 

En outre, certains baux peuvent contenir une clause de résiliation de plein droit qui permet de mettre fin au bail automatiquement, et ce, sans avoir à entreprendre un recours judiciaire. En l’absence d’une telle clause, la partie qui souhaite résilier le bail devra entreprendre le recours judiciaire approprié après avoir procédé à la mise en œuvre du mécanisme de défaut prévu au bail. 

6. La clause d’assurance et la police d’assurance afférente 

Plusieurs baux commerciaux comportent des clauses obligeant le locataire à souscrire à des assurances en cas de perte d’exploitation. Or, il importe de consulter toute police d’assurance souscrite afin de déterminer si celle-ci pourrait entraîner une couverture.