La responsabilité environnementale des administrateurs et des dirigeants

Le 29 août 2013, le ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (ci-après le « Ministre ») avait ordonné à la compagnie Les Équipements de puissance Reliance ltée (ci-après le « Reliance ») de procéder au nettoyage de son site d’entreposage de matières contaminées aux BPC, à Pointe-Claire. Compte tenu du défaut de Reliance de s’exécuter, le Ministre a dû engager 3,8 millions de dollars pour éliminer les BPC et sécuriser le site. Le 5 mars dernier, Radio-Canada1 nous apprenait que, dans cette affaire, le Ministre avait inscrit un avis d’hypothèque légale sur la maison de Mme Birdie Marshall. Or, si Mme Marshall devait acquitter la dette de la compagnie Reliance, c’est qu’elle en était l’administratrice et l’actionnaire. Cette affaire est l’occasion de rappeler certaines règles au Québec relatives à la responsabilité environnementale des administrateurs et des dirigeants.

D’abord, il faut savoir que les administrateurs et les dirigeants d’une personne morale sont solidairement responsables de la dette environnementale de celle-ci, à moins qu’ils ne démontrent avoir fait preuve de prudence et de diligence pour prévenir le manquement dont découle la réclamation (art. 115.50 de la Loi sur la qualité de l’environnement, ci-après la « LQE »).

Dès lors, tous les biens meubles et immeubles de l’administrateur ou du dirigeant peuvent faire l’objet d’une hypothèque légale pour garantir le remboursement d’un montant dû au Ministre, comme ce fut le cas pour Mme Marshall (art. 115.51 de la LQE).

De plus, la LQE établit une présomption de responsabilité pénale à l’endroit des administrateurs et des dirigeants d’une personne morale, à moins qu’ils n’établissent encore une fois avoir fait preuve de prudence et de diligence en prenant toutes les précautions nécessaires pour prévenir la perpétration de l’infraction (art. 115.40 de la LQE).

Enfin, la LQE confère au Ministre et au gouvernement le pouvoir discrétionnaire de refuser de délivrer ou renouveler, de modifier, de suspendre ou de révoquer toute autorisation qu’ils délivrent, notamment si l’un des administrateurs, dirigeants ou actionnaires d’une personne morale a commis, au cours des dernières années, certains manquements environnementaux, fiscaux ou criminels (art. 115.5 et suivants de la LQE).

À la lumière de ce qui précède, les personnes morales devraient être prudentes à l’occasion de la sélection de leurs administrateurs et dirigeants. De même, l’administrateur sollicité devrait, avant d’accepter sa charge, s’assurer de l’état des affaires de la compagnie au plan environnemental. Nous recommandons donc à tout futur administrateur de vérifier, entre autres :

  • si la personne morale a mis en place des politiques environnementales et des mesures pour prévenir les infractions et, de manière plus générale, à assurer la conformité aux dispositions législatives et réglementaires;
  • si la personne morale fait l’objet d’un avis de non-conformité, d’une ordonnance ou d’un constat d’infraction en matière environnementale.

De même, la personne morale, lors de la sélection de ses administrateurs et dirigeants, devrait s’assurer, entre autres, que le candidat :

  • n’est pas en défaut de respecter une ordonnance ou une injonction rendue en vertu de la LQE ou de payer une compensation au Ministre;
  • n’a pas été déclaré coupable d’une infraction à la LQE ou à l’un de ses règlements;
  • n’a pas été administrateur, dirigeant ou actionnaire d’une personne morale qui a été déclarée coupable d’une infraction à la LQE ou à l’un de ses règlements.

Ce sont là quelques exemples de questions essentielles qui devraient être abordées au moment de la sélection des administrateurs et dirigeants d’une personne morale et qui prennent toute leur importance suivant les changements législatifs et selon les récentes positions prises par le Ministre.

Dans un contexte de questionnement au niveau environnemental et de la mise en place de toutes ces mesures législatives, les personnes morales, leurs administrateurs et leurs dirigeants se devront de poser les bonnes questions, de faire preuve de diligence et de consulter, le cas échéant, des spécialistes en droit de l’environnement.


1 Marie-Ève Maheux, « Entreposage illégal de BPC à Pointe-Claire : Québec veut récupérer 4 millions », Radio-Canada, 5 mars 2015, http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2015/03/05/001-entreposage-illegal-bpc-pointe-claire-avis-hypothque-legale-ministere-environnement.shtml.