La protection des secrets d’entreprise

Lors de la résolution d’un litige, les tribunaux favorisent la divulgation de l’information, et ce, afin d’assurer une connaissance de tout élément pertinent à une affaire. Or, dans un marché concurrentiel, comment protéger les données confidentielles qui sont vitales à l’entreprise et propres à son identité, son ADN?

La protection des secrets d’entreprise devant les tribunaux pourra s’avérer efficace, en autant que des mesures auront été mises en place convenable­ment et raisonnablement. Cela pourrait se révéler particulièrement utile pour se prémunir à une demande d’accès à l’information, ou lors de la mise en application d’une entente de confidentialité.

La notion de secret d’entreprise

Ce concept confirmé par les tribunaux relève du droit de la propriété. Les renseignements visés doivent avoir une valeur commerciale, réelle ou potentielle, du fait qu’ils sont secrets. Pour que l’information soit considérée comme secrète, des dispositions doivent avoir été prises pour en assurer le caractère confidentiel et ainsi limiter son accessibilité, même auprès de personnes appartenant au milieu en question. Il doit être manifeste que son propriétaire la considère et la traite comme secrète.

Le secret d’entreprise réunit tant le « secret de fabrication » que l’« information confidentielle ». On utilise aussi les expressions « secrets industriels » et « secrets commerciaux » pour désigner l’une et l’autre catégorie.

La première catégorie nécessite que l’objet de l’innovation demeure secret, qu’il soit d’utilité continue et qu’il procure un avantage concurrentiel sur les autres entreprises. La seconde catégorie, quant à elle, est de portée beaucoup plus large. À titre d’illustration, un procédé de fabrication, une recette ou formule de même qu’un mécanisme non breveté ont trait aux secrets de fabrication ou secrets industriels alors qu’un projet de mise en marché, une note interne, une liste de clients ou un document financier seraient plutôt considérés de l’information confidentielle ou secret commercial.

Certaines actions à prendre pour protéger ses secrets d’entreprise.1

  1. En assurer la protection en rangeant l’objet du secret de fabrication ou le document confidentiel en lieu sûr et sécurisé.
  2. Limiter l’accès à un nombre restreint de personnes, c’est-à-dire seules les personnes travaillant au projet particulier ou ayant besoin de l’information confidentielle, doivent en avoir connaissance ou y être exposées;
  3. Réserver un endroit particulier pour la conception et la réalisation du secret de fabrication et où pourraient s’effectuer certains contrôles;
  4. Informer tous les employés concernés du caractère confidentiel de l’information ou secret de l’objet en conception et des conséquences en cas de divulgation;
  5. Marquer « confidentiel » , « secret », « proprietary », « accès ou usage restreint », l’objet ou document considéré secret d’entreprise.
  6. Inclure une clause de confidentialité à l’entente de travail des employés concernés, ou faire signer une entente de confidentialité aux tiers impliqués.

La reconnaissance du secret d’entreprise par les tribunaux

D’entrée de jeu, il faut retenir que seule l’information bénéficiant d’une protection offerte par la loi, comme en vertu du secret professionnel, sera entièrement protégée et non divulguée. Par voie de conséquence, une information, bien que confidentielle, si elle est pertinente à une affaire devant les tribunaux, devra être communiquée en temps utile.

Toutefois, dans le cadre d’un litige, il est possible de restreindre la divulgation. Aussi, il faudra pouvoir convaincre le tribunal du caractère confidentiel en faisant, notamment, la démonstration des mesures de protection mises en place par le propriétaire de l’objet ou document considéré secret, comme celles suggérées plus haut.

Dans ces circonstances, le juge pourra gérer la situation au plan juridique et statuer sur la meilleure façon de divulguer le secret d’entreprise en cause, tout en sauvegardant les intérêts de la justice sans nuire aux intérêts commerciaux du propriétaire. Ainsi, il pourrait ordonner une mise sous scellé ou une communication restreinte aux avocats et à leurs experts.

Il est enfin utile de rappeler que la Cour suprême a reconnu que, dans le cadre d’un litige, tout renseignement transmis à une partie doit être reçu et traité confidentiellement.


1 L’énumération n’est pas exhaustive.