Parité hommes-femmes dans les C.A. : ce n’est pas encore gagné!

Cet article a d’abord paru sur le blogue Conseiller.ca.

La diversité et la juste représentation d’hommes et de femmes au sein des conseils d’administration intéressent de plus en plus les investisseurs, les régulateurs des marchés financiers au Canada et la population en général. 

L’importance qu’une compagnie donne à ces enjeux est considérée par plusieurs comme une question de gouvernance d’entreprise. Ce faisant, les gouvernements et les régulateurs du secteur financier cherchent des moyens pour encourager et forcer les compagnies publiques à augmenter le nombre de femmes siégeant au sein des conseils d’administration, faute de quoi, ceux-ci voudraient les obliger à en informer leurs actionnaires ou à justifier cette disparité. 

En 2011, le Québec a pris une initiative novatrice en modifiant sa Loi sur la gouvernance des sociétés d’État1 afin que les conseils d’administration des sociétés d’État soient constitués à parts égales d’hommes et de femmes et qu’ils reflètent les différentes composantes de la société québécoise. 

Depuis son entrée en vigueur, la grande majorité des conseils d’administration des sociétés d’État au Québec présentent une parité hommes-femmes. La situation est toutefois différente dans les conseils d’administration d’autres sociétés. 

En effet, une enquête de Catalyst révèle qu’en 2013 les femmes n’occupaient que 15,9 % des sièges aux conseils d’administration des sociétés du classement Financial Post 500 et n’étaient aucunement représentées au sein des conseils d’administration de près de 40 % de ces sociétés. 

Bien que le Québec se situe au-dessus de la moyenne canadienne en ce qui concerne la proportion de femmes aux conseils d’administration, plusieurs diront que c’est en raison des sociétés d’État. 

Les régulateurs veulent intervenir 

La majorité des régulateurs du secteur financier désirent maintenant s’assurer que les entreprises adoptent une politique pour augmenter la diversité dans les conseils d’administration et la proportion de femmes qui y siègent ou, à défaut, qu’elles expliquent à leurs investisseurs pourquoi elles ne désirent pas s’y conformer. 

L’une des premières commissions des valeurs mobilières canadiennes à poser un geste concret est celle de l’Ontario. Au début de 2014, elle a soumis pour commentaires un projet de modification des règles de gouvernance, par lequel elle propose d’obliger tous les émetteurs inscrits à la TSX et les autres émetteurs non émergents assujettis à informer leurs actionnaires de leur politique pour augmenter la représentation féminine au sein des C. A. ou d’expliquer pourquoi ils ne veulent pas s’y conformer. 

La période de commentaires est maintenant terminée et ceux-ci se sont révélés pour la plupart positifs. Les quelques dissidences mettaient principalement en doute la légitimité des régulateurs à intervenir dans la composition des conseils d’administration des compagnies publiques.

Il est prévu que la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario adopte ces modifications dès la fin de 2014. Aucune sanction n’a cependant été prévue en cas de manquement à ces nouvelles règles. 

En juillet dernier, les autorités en valeurs mobilières de la Saskatchewan, du Manitoba, du Québec, du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, de Terre-Neuve-et-Labrador, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut ont emboîté le pas à l’Ontario et ont publié, elles aussi, un projet de règlement modifiant le Règlement 58-101 sur l’information concernant les pratiques en matière de gouvernance. 

Elles désirent ainsi obtenir les commentaires des gens de l’industrie. Les autorités de la Colombie-Britannique, de l’Alberta et de l’Île-du-Prince-Édouard n’ont, pour l’instant, pas manifesté l’intention d’adopter de telles règles. 

Au fédéral, la ministre du Travail et de la Condition féminine, K. Kellie Leitch, a présenté en juin dernier le rapport du Conseil consultatif pour la présence des femmes aux conseils d’administration. Intitulé « Bon pour les affaires : Plan pour accroître la participation des femmes aux conseils d’administration », le rapport se fonde sur les meilleures pratiques ayant cours au pays et dans le monde pour fixer des objectifs et formuler des recommandations au gouvernement du Canada. 

Il recommande notamment : 

  • d’établir à 30 % l’objectif national de représentation des femmes d’ici 2019;
  • d’assurer davantage de recrutements de femmes à des postes de direction et aux postes faisant l’objet de nominations par décret;
  • d’instaurer une approche fondée sur le principe « se conformer ou s’expliquer »;
  • de favoriser un équilibre entre les femmes et les hommes grâce à des politiques, des pratiques de gestion de ressources humaines, des comités de candidature, etc. 

L’Europe en exemple 

L’Europe, avant-gardiste en la matière, continue à promouvoir une participation équilibrée des femmes et des hommes dans les processus décisionnels des entreprises. En effet, la Commission européenne a pris l’initiative en 2012 d’adopter une directive visant à porter la proportion de femmes aux postes d’administrateurs dans les sociétés cotées en bourse à 40 % d’ici 2020. 

Un an plus tard, le Parlement européen a également abordé cette question et a voté pour la proposition de la Commission européenne. 


1 Chapitre G-1.02.

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