Les droits sur les mutations de biens réels au Québec : de nouveaux enjeux

Dans le cadre du budget 2016-2017 (le « budget »), Carlos Leitão, ministre des Finances du Québec, a annoncé plusieurs modifications au régime québécois des droits sur les mutations payables lors de certains transferts de biens réels conformément à la Loi concernant les droits sur les mutations immobilières (la « Loi »). Le 8 février 2017, ces changements ont été ratifiés par des dispositions législatives applicables à tous les transferts d’immeubles situés au Québec survenus après le 17 mars 2016.

Le 9 novembre 2017 le gouvernement du Québec a déposé le Projet de loi no 146 : Loi donnant suite principalement à des mesures fiscales annoncées à l’occasion du discours sur le budget du 28 mars 2017 (« projet de loi 146 »), qui apporte des éclaircissements supplémentaires à ces modifications. 

Modifications à la suite du budget

Avant le budget, la loi stipulait que toutes les municipalités devaient percevoir des droits sur les mutations d’immeubles à compter de la date de l’enregistrement desdites mutations au registre foncier du Québec. En raison de ce libellé, certaines opérations étaient structurées de manière à éviter tout enregistrement au registre foncier, retardant ainsi indéfiniment le paiement de droits de mutation. À la suite du budget, à compter du 18 mars 2016, les droits de mutation sont désormais payables à la date du transfert de l’immeuble, que le transfert soit enregistré ou pas. Les cessionnaires d’immeubles doivent désormais soit enregistrer le transfert soit remettre une déclaration à la municipalité où est situé l’immeuble dans les 90 jours suivant la date du transfert. En cas de défaut d’enregistrer ou de faire une déclaration, un droit correspondant à 150 pour cent du droit de mutation pour l’immeuble sera imposé au cessionnaire.

Les modifications à la Loi présentées dans le budget apportaient également une révision aux exonérations existantes au paiement des droits de mutation. À titre d’exemple, avant le budget 2016-2017, les mutations entre deux personnes morales étroitement liées étaient exonérées à condition que certaines conditions soient respectées concernant la propriété de 90 % des actions avec droit de vote par la personne morale liée, ou concernant la propriété de 90 % de la juste valeur marchande des actions émises et en circulation par la personne morale liée.

Depuis le budget, ces exonérations prévues par la Loi ont été resserrées, ce qui a donné lieu à un critère unique fondé sur la propriété de 90 % du nombre de droits de vote rattachés aux actions émises (l’« Exonération liée aux droits de vote »). En outre, l’exonération liée aux droits de vote doit être maintenue pendant 24 mois à la suite du transfert de l’immeuble. Le défaut de se conformer à la période de restriction de 24 mois entraîne une obligation de payer les droits de mutation applicables. Si l’exonération liée aux droits de vote cesse de s’appliquer dans les 24 mois suivant le transfert de l’immeuble, une déclaration doit être faite à la municipalité et les droits de mutation doivent être payés.

Des changements supplémentaires ont été apportés à la Loi, conformément au Projet de loi no 122 : Loi visant principalement à reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs, qui a accordé aux municipalités québécoises l’autonomie nécessaire pour établir leurs propres taux de droits de mutation, jusqu’à un maximum de 3 %, pour toute tranche de transfert de biens réels dépassant 500 000 $.

Modifications supplémentaires conformément au projet de loi 146

Le projet de loi 146 modifie encore davantage le régime de droits de mutation du Québec, comme suit :

  • En retirant l’exigence de communiquer les noms des membres de tout ordre professionnel ayant rendu des services relativement au transfert d’un immeuble lors du dépôt d’un avis de divulgation;
  • En créant des exceptions à l’exigence de produire un avis de divulgation lorsque l’Exonération liée aux droits de vote cesse de s’appliquer, dans le contexte de la fusion ou de la dissolution d’une personne morale;
  • En allégeant la règle d’exonération applicable concernant les transferts d’un immeuble dans le contexte d’une succession.

En ce qui concerne les exceptions à l’exigence de produire un avis de divulgation dans le contexte d’une fusion ou d’une liquidation, conformément au projet de loi 146, le cessionnaire d’un immeuble dont le transfert était exonéré du paiement des droits de mutation aux termes de l’Exonération liée aux droits de vote n’aura pas à payer les droits de mutation qui auraient autrement été exigibles à l’égard du transfert si, à un moment donné au cours de la période de 24 mois suivant la date de transfert de l’immeuble, le cédant et le cessionnaire qui sont parties au transfert cessent d’être des personnes morales étroitement liées en raison de l’un des événements suivants :

  • leur fusion;
  • la fusion du cédant ou du cessionnaire avec une ou plusieurs personnes morales, si la personne morale issue de cette fusion est étroitement liée au cessionnaire ou au cédant tout au long de la période qui débute immédiatement après cette fusion et qui se termine 24 mois suivant la date du transfert de l’immeuble; ou
  • la dissolution du cessionnaire ou du cédant.

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