Le nouveau Projet de loi no 79 sur la restructuration des régimes de retraite du secteur municipal survivra-t-il aux élections?

La ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale et ministre du Travail, Mme Agnès Maltais, a déposé le 20 février dernier, soit quelques jours avant le déclenchement de la campagne électorale, le Projet de loi no79 : Loi concernant la restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal et d’autres modifications à ces régimes qui vise à assainir la situation financière des régimes de retraite municipaux et d’en assurer la stabilité. Ce projet de loi fait suite au rapport D’Amours sur l’avenir du système de retraite québécois1 qui avait recommandé, entres autres, de telles modifications dans les régimes de retraite municipaux.

Les organismes municipaux visés

Selon ce projet de loi, les régimes de retraite établis par un organisme municipal dont le taux de capitalisation est de moins de 85 % au 31 décembre 2013 ou qui offrent des subventions pour retraites anticipées avant l’âge de 55 ans devront obligatoirement être restructurés. Présentement, environ 110 des 170 régimes de retraite municipaux, dont ceux des villes de Québec et de Montréal, seraient visés par ce projet de loi.

Les municipalités et les autres organismes municipaux dont les régimes de retraite sont suffisamment capitalisés pourront, s’ils le souhaitent et avec l’approbation des participants actifs, se soumettre volontairement au processus de restructuration.

Le processus de restructuration

Ce processus de restructuration débutera par l’envoi au ministre du Travail, par l’organisme municipal, d’une déclaration indiquant qu’il est visé par la présente restructuration. Cette déclaration devra être transmise au plus tard le 1er juillet 2014 et être basée sur une évaluation actuarielle au 31 décembre 2013.

Ensuite, des négociations entre l’organisme municipal et les participants actifs, dont le but sera de conclure une entente, se dérouleront sur une période maximale de six mois et en l’absence d’entente à la fin de la période de négociation, suivra une période de conciliation de six mois supplémentaires.

Au terme de ce processus, si aucune entente n’est conclue, la Commission des relations du travail devra trancher le différend dans un délai de six mois. Elle devra obtenir un avis de la Régie des rentes, notamment sur la conformité des propositions soumises avec les dispositions législatives, et pourra mandater un expert en finances municipales pour l’aider à évaluer la capacité de payer des contribuables.

Certaines mesures seront négociées

Dans le cadre d’un processus de restructuration, toute modification négociée doit servir à assainir la situation financière du régime de retraite ou à en assurer la stabilité. Certaines mesures feront donc obligatoirement partie des négociations, tandis que d’autres mesures seront négociées à la discrétion des parties.

L’organisme municipal et les participants actifs devront négocier certaines mesures spécifiées dans le projet de loi, notamment l’atteinte d’un niveau de capitalisation minimal de 85 % et l’abolition de la subvention pour retraite anticipée avant l’âge de 55 ans.

De plus, pourront notamment faire l’objet de négociations, le partage des coûts de déficits passés, l’abolition ou la modification de toute prestation prévue au régime, sauf la rente normale, etc. Par contre, les parties ne pourront réduire les rentes consenties aux retraités ou aux bénéficiaires, sauf pour éliminer l’indexation, et ce, seulement sous certaines conditions.

Finalement, tout engagement supplémentaire négocié devra être pleinement capitalisé. 

D’autres mesures seront obligatoires

Les régimes de retraite qui ne sont pas soumis au processus de restructuration devront néanmoins être modifiés afin de prévoir des mesures visant le partage des coûts à parts égales pour le service courant, et afin d’abolir la prestation additionnelle prévue à l’article 60.1 de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite2.

Aussi, tout régime de retraite, qu’il soit soumis ou non au processus de restructuration, devra être modifié afin de prévoir une provision pour écarts défavorables constituée par le biais d’une réserve ou d’un fonds de stabilisation.

L’avenir

Avec le récent déclenchement de la campagne électorale provinciale, ce projet de loi est mort au feuilleton. Il faudra donc attendre le résultat des élections pour voir si ce projet de loi sera repris par le prochain gouvernement.

Si tel est le cas, il y aura certainement de nombreuses questions à résoudre quant à la mise en œuvre de ce processus de restructuration.


1 Commission des finances publiques, Innover pour pérenniser le système de retraite, Direction des travaux parlementaires, septembre 2013
2 RLRQ c R-15.1, art. 60.1