Infractions CCQ et Carnet de référence : deux entreprises acquittées

Publié par notre équipe de droit du travail et de l’emploi. Cet article a d’abord paru dans le bulletin Les experts de la construction – Édition du 27 avril 2016 de l’Association patronale des entreprises en construction du Québec. 

Depuis 2013, la Commission de la construction du Québec (CCQ) impose l’utilisation du Carnet de référence aux entrepreneurs en construction qui souhaitent combler leurs besoins en main-d’œuvre. Cet outil de recrutement remplace la pratique, maintenant illégale, voulant que l’employeur contacte directement un syndicat afin d’obtenir les services de salariés. Dans le but d’assurer l’exactitude des renseignements contenus au Carnet, la réglementation rend obligatoire la transmission d’avis d’embauche et de fin d’emploi. 

Depuis janvier 2014, afin de s’assurer du respect de cette obligation, la CCQ a émis des milliers de constats d’infraction dont les amendes vont de 1 039 $ à 2 079 $1, et ce, au grand désarroi des entrepreneurs. Il convient donc de faire mention de deux décisions récentes dans lesquelles les entrepreneurs ont contesté avec succès les constats d’infraction qui leur avaient été imposés2

Les entrepreneurs étaient accusés d’avoir omis d’aviser la CCQ de l’embauche d’un travailleur. Ceux-ci ont contesté leur constat d’infraction en présentant, comme seul argument, le fait que le poursuivant n’était pas en mesure de faire la preuve spécifique de la date de l’infraction. La CCQ (DPCP) soutenait qu’une telle preuve était inutile car l’infraction se perpétuait de jour en jour : selon elle, il suffisait de démontrer qu’à n’importe quel moment, l’employeur avait été en infraction. 

La Cour du Québec a retenu l’argument des employeurs : il s’agit d’une infraction unique, qui survient à un moment précis. Le règlement indique que l’avis doit être envoyé dans les 48 heures qui suivent l’embauche, excluant le samedi et le dimanche. Selon cette logique, la preuve doit démontrer que l’infraction survient au moment de l’expiration du délai. Ainsi, la date de l’infraction est un élément que la poursuite doit démontrer hors de tout doute raisonnable. Les autres éléments dont le poursuivant devra faire la preuve sont le statut d’employeur, le statut de salarié, l’exécution de travaux par le salarié, son embauche et l’assujettissement des travaux. 

À la lumière de ce développement jurisprudentiel, nous pouvons avancer que le fardeau de preuve de la poursuite, en cas d’omission de transmettre un avis de licenciement, de mise à pied ou de départ d’un employé, nécessitera une preuve hors de tout doute raisonnable de la date de l’infraction. 

Rappelons qu’il importe tout de même d’agir avec diligence dans le respect des consignes et des délais imposés par la CCQ. D’une part, celle-ci devrait remédier sans trop tarder à cette carence concernant sa preuve et, d’autre part, le non-respect de la réglementation constitue une infraction réglementaire passible d’amendes salées pour ce qui est, plus souvent qu’autrement, un oubli administratif…   

Compte tenu de l’évolution rapide de la jurisprudence concernant ces avis d’embauche et de fin d’emploi, nous vous invitons à consulter votre avocat advenant la réception d’un constat d’infraction de la CCQ (DPCP). Sachez de plus que si vous décidez de contester, vous devez enregistrer un plaidoyer de non-culpabilité dans les 30 jours de la réception du constat.

Écrit en collaboration avec Georges Samoisette Fournier, stagiaire


1 Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d’oeuvre dans l’industrie de la construction, RLRQ c R-20, art. 119.0.2.
2 Directeur des poursuites criminelles et pénales (DCPC) c. Maçonnerie D. Tremblay inc., N° 240-61-031699-154, district de Charlevoix, juge de paix magistrat Nathalie Duperron Roy, 11 avril 2016; Directeur des poursuites criminelles et pénales (DCPC) c. 9168-5701 Québec inc., N° 240-61-031699-158, district de Charlevoix, juge de paix magistrat Nathalie Duperron Roy, 11 avril 2016.