Employeurs de juridiction fédérale, le nouveau Règlement sur la prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail entre en vigueur dans quelques mois – préparez-vous!

Introduction

Dans la foulée des amendements qui ont été apportés au Code canadien du travail1 en matière de harcèlement et de violence au travail2, le projet de Règlement sur la prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail (le « Règlement ») a particulièrement suscité l’intérêt des employeurs de juridiction fédérale, et ce, en raison des adaptations et des changements majeurs qu’il laissait présager.

Nous attendions la date précise de son entrée en vigueur. Elle vient d’être annoncée : le Règlement entrera en vigueur le 1er janvier prochain3. Comme employeur fédéral, vous devez vous préparer à l’entrée en vigueur de ce Règlement qui représente une modification significative des règles applicables en droit du travail fédéral.

Rappelons que le Règlement s’inscrit dans la lutte du gouvernement fédéral amorcée au cours des dernières années pour contrer le harcèlement et la violence en milieu de travail et assurer la santé et la sécurité des travailleurs canadiens dans les milieux de travail sous réglementation fédérale. Ceci constitue assurément un sujet chaud partout au pays en ce qui concerne la gestion des ressources humaines et les principes de gouvernance, et qui est maintenant supporté par des règles formelles de droit du travail au fédéral.

Le Règlement remplace la partie XX du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail4, certaines portions du Règlement du Canada sur les normes du travail, ainsi que plusieurs règlements en matière de santé et de sécurité au travail dans les secteurs maritime, de l’aviation, du pétrole et du gaz et des trains5.

 

Survol du Règlement

Avant l’entrée en vigueur du Règlement le 1er janvier 2021, des mesures préalables devraient être déployées par les entreprises concernées.

Le Règlement comporte plusieurs obligations détaillées qui doivent être respectées. Notamment, la procédure de dépôt des plaintes est encadrée : elle doit permettre qu’un avis d’incident soit donné oralement ou par écrit, et qu’il puisse être donné par un témoin anonyme. Ceci comporte en soi une distinction d’importance par rapport à plusieurs façons de faire et politiques internes dans les entreprises.

Le Règlement exige aussi le respect de délais courts et stricts quant à la tenue d’une enquête suivant le dépôt d’une plainte. Le plaignant doit aussi pouvoir être représenté dans le cadre de sa plainte.

L’employeur (conjointement avec le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant en matière de santé et sécurité) devra élaborer une politique de prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail. À cet égard, soulignons que différents éléments devront être inclus expressément dans la politique, notamment les mesures de soutien offertes aux employés, un résumé de la formation qui sera donnée en lien avec le harcèlement et la violence ainsi qu’un résumé du processus de règlement. La politique, de même que la formation qui l’accompagne, devra être mise à jour au moins tous les trois ans ainsi qu’à la suite de tout changement à un élément de la politique6.

Le Règlement met l’accent sur la conciliation et démontre une intention claire de favoriser le règlement rapide et la discussion comme mode de résolution des plaintes. Ces efforts doivent commencer au plus tard quarante-cinq jours après la date à laquelle la plaine est déposée.

L’employeur devra mener une enquête concernant tous les cas de harcèlement et de violence qui n’ont pas été réglés en vertu des dispositions portant sur le règlement négocié et la conciliation lorsque la partie plaignante en fait la demande. Plusieurs modalités sont alors précisées dans le Règlement et doivent être respectées pour que l’enquête soit conforme. Des modalités quant au choix de l’enquêteur sont prévues dans le Règlement. Notamment, lorsque l’employeur et le partenaire concerné (le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant) ont élaboré ou sélectionné conjointement une liste de personnes qui pourraient agir comme enquêteur, l’employeur choisit une personne parmi cette liste pour agir aux fins de l’enquête7. Lorsqu’une telle liste n’a pas été mise en place, l’enquêteur sera la personne choisie de consentement par l’employeur, la personne plaignante ainsi que la personne mise en cause. À défaut d’entente dans le délai prescrit, l’enquêteur sera sélectionné parmi les personnes que le Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail a désignées comme ayant les connaissances, la formation et l’expérience requises8.

L’enquête doit se conclure par le dépôt d’un rapport. Celui-ci doit être remis notamment aux parties impliquées (soit la personne plaignante et la personne mise en cause) et au comité local ou au représentant9. Les renseignements devant être inclus dans le rapport sont prévus dans le Règlement10.

L’employeur devra adopter des mesures rigoureuses de protection de la vie privée pour inciter les employés à signaler des cas de harcèlement ou de violence au travail. La politique de prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail devra décrire les mesures prises pour protéger la vie privée des personnes impliquées.

L’employeur devra préparer, au plus tard le 1er mars de chaque année, un rapport annuel adressé au ministre du Travail concernant les plaintes en matière de harcèlement et de violence dans le lieu de travail. Les éléments devant être indiqués dans le rapport annuel sont aussi listés dans le Règlement11

 

Conseils pratiques

En tant qu’employeur fédéral, vous avez dû dans les dernières années vous adapter à des changements aux normes applicables en droit du travail fédéral. Le Règlement sur la prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail est une modification d’importance à analyser en vue d’être prêt à en mettre en œuvre l’application à compter du 1er janvier prochain. Plusieurs entreprises fédérales considéreront donc ce Règlement et ses composantes à l’automne 2020, afin d’être fin prêts pour son entrée en vigueur.

Notamment, nous vous recommandons de :

  • mettre à jour ou adopter, conformément au Règlement, une politique de prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail;
  • évaluer les facteurs de risque de harcèlement et de violence en milieu de travail;
  • prévoir des séances de formation pour le personnel et les membres de la direction;
  • préparer une liste de personnes se qualifiant pour agir en tant qu’enquêteur;
  • évaluer l’impact dans vos milieux de travail des diverses exigences contenues au Règlement concernant le consentement au choix d’enquêteur, la conciliation, les échanges avec les comités mentionnés, pour ne nommer que ceux-là;
  • conserver des dossiers sur chaque incident de harcèlement et de violence en milieu de travail.

Notre équipe de droit du travail et de l’emploi comporte une pratique très développée en droit de l’emploi et aux relations de travail pour les entreprises fédérales. N’hésitez pas à nous contacter pour assistance en la matière.


1 Code canadien du travail, L.R.C. (1985), c. L-2.
2 https://langlois.ca/le-code-canadien-du-travail-fait-peau-neuve-apercu-des-principales-modifications-en-matiere-de-harcelement-et-de-violence-au-travail.
3 Le 24 juin 2020, le gouvernement du Canada a publié le Règlement dans la Partie II de la Gazette du Canada et a annoncé sa date d’entrée en vigueur (Gazette du Canada, Partie II, vol. 154, no. 13, DORS/2020-130).
4 Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, DORS/86-304.
5 Voir notamment les articles 38 à 54 du Règlement.
6 Article 10 du Règlement. Toutefois, il est à noter que si les parties (soit l’employeur et le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant) n’arrivent pas à s’entendre sur toute affaire qu’ils doivent régler « conjointement » en vertu du Règlement, la décision de l’employeur l’emporte (article 2 du Règlement).
7 Article 27 du Règlement.
8 Ibid.
9 Article 30 du Règlement.
10 Ibid.
11 Article 36 du Règlement.