Maraudage syndical : comment l’employeur peut-il jouer son rôle sans transgresser les interdictions du Code du travail?

Introduction

L’avènement d’une campagne d’accréditation syndicale génère des impacts importants qui ont des effets à long terme dans une entreprise et ce, peu importe la résultante. En effet, l’employeur aura maintenant l’obligation de reconnaître le syndicat accrédité comme étant le représentant unique des salariés visés par l’unité de négociation et cette reconnaissance imposera donc des balises dans ses relations avec ceux-ci. Comme l’employeur ne pourra chercher à entraver les actions du syndicat, son droit de communication sera maintenant limité et il devra user de précaution pour aborder tout sujet pouvant se rapporter aux conditions de travail des salariés.

Dans cette même période, l’employeur sera aussi confronté à des décisions importantes concernant la liste des salariés visés par l’accréditation, les exclusions et la description de l’unité de négociation.

L’objet de la présente est de vous offrir un survol des grands enjeux que posent, pour un employeur, les diverses interventions à faire dans le contexte d’une campagne de syndicalisation ainsi que les meilleures pratiques à suivre dans une telle situation.

I. Étape 1 : La campagne de sollicitation d’adhésions

i. Les règles de droit applicables aux rapports collectifs de travail

a) Les droits et les restrictions des employés

Les droits

La Charte canadienne1 et la Charte québécoise2 reconnaissent à toute personne la liberté fondamentale d’association. Celle-ci a été définie par la jurisprudence comme visant « toute une gamme d’associations ou d’organisations de nature politique, religieuse, sociale ou économique, ayant des objectifs très variés, de même que les activités qui permettent de poursuivre ces objectifs »3. Quelques années plus tard, les tribunaux ont inclus à cette définition la protection de la poursuite collective d’objectifs communs4 incluant le fait pour des individus de s’associer et d’exercer des activités licites. La liberté d’association vise donc non seulement les activités individuelles exercées collectivement, mais aussi les activités associatives elles-mêmes5.

Outre les Chartes, le Code du travail6 reconnaît aussi le droit d’association des salariés en établissant que « tout salarié a droit d’appartenir à une association de salariés de son choix et de participer à la formation de cette association, à ses activités et à son administration »7.

Les restrictions

En vue de favoriser la protection de la continuité des opérations de l’entreprise, le Code du travail interdit à tout salarié de solliciter l’adhésion d’un autre salarié à une association pendant les heures de travail8, ce qui exclut les périodes de repos ou de dîner, qu’elles soient rémunérées ou non9. Le salarié qui contrevient à cette règle donnera à l’employeur une « cause juste et suffisante » de suspension10.

Toujours dans le même objectif, l’association de salariés ne doit tenir aucune réunion de ses membres sur les lieux du travail lors du processus d’accréditation syndicale11 à moins d’avoir obtenu l’autorisation de l’employeur. Le terme « réunion » vise toute modalité de réunion telle des réunions « officielles », « officieuses », « de facto » ou « spontanée »12.

Les sanctions

En cas de violation des articles 5 et 6 du Code du travail, les salariés ou l’association de salariés commet (tent) une infraction passible d’une amende allant de 100 $ à 500 $ pour une première infraction et de 1 000 $ à 5 000 $ pour chaque récidive13.

b) Les droits et les restrictions des employeurs

Les droits

Le pendant de la liberté d’association pour l’employeur est la liberté d’expression. Cette liberté est aussi reconnue par la Charte canadienne14 et la Charte québécoise15 comme étant fondamentale. La jurisprudence a déterminé que toute expression visant à transmettre un message, sous toute forme que ce soit, est comprise dans cette garantie16.

Les restrictions

En raison du droit d’association des salariés, de leur situation juridique extrêmement vulnérable et du pouvoir économique important que l’employeur détient sur eux17, le Code du travail impose certaines restrictions à l’employeur. En effet, celui-ci empêche tout employeur, ou son représentant, de s’ingérer dans une association de salariés en leur interdisant de chercher à dominer, à entraver, à financer ou à participer à la formation ou aux activités d’une telle association18. Il leur prohibe aussi d’ « user d’intimidation ou de menaces pour amener quiconque à devenir membre, à s’abstenir de devenir membre ou à cesser d’être membre d’une association de salariés (…) »19. L’employeur n’a donc pas le droit de s’ingérer dans les activités syndicales, d’autant plus qu’il n’est pas considéré comme une « partie intéressée » aux fins de l’établissement du caractère représentatif du syndicat.

En raison de ces restrictions, l’employeur ou ses représentants doivent faire preuve de grande précaution lors des communications qu’ils ont avec les salariés. Malgré ces restrictions, il est toutefois impossible que la philosophie sous-jacente du Code du travail soutienne qu’un employeur ne devra jamais se prononcer sur l’offre faite à ses salariés d’adhérer à une association de salariés, tel que mentionné dans l’affaire Disque Améric20. Quel est le « corridor étroit que peut légalement emprunter un employeur désirant utiliser son droit constitutionnel de s’exprimer librement, dans un contexte de syndicalisation de son entreprise »21? Selon la même affaire, un employeur exercerait légitimement son droit d’expression « lorsque sans promesse ou menace que ce soit, directement ou indirectement, il tiendra des propos peut-être polémique mais sans outrance ni mensonge et qui s’adressent essentiellement à la raison plutôt qu’aux émotions des interlocuteurs ou lecteurs, lesquels doivent être libres de recevoir ou non le message »22.

En effet, « les propos que l’employeur peut tenir, en paroles ou en écrits, à ses salariés pour manifester son opposition à la syndicalisation, doivent rencontrer dans un contexte normal, les éléments ci-après, pour relever légalement de son droit à la libre expression, plutôt que constituer une ingérence dans le droit d’association »23 :

  1. Il ne doit faire directement ou indirectement aucune menace;
  2. Il ne doit faire directement ou indirectement aucune promesse pour amener les salariés à adopter son point de vue;
  3. Il doit tenir des propos défendables quant à leur réalité;
  4. Il doit s’adresser à la réflexion des personnes et non soulever leurs émotions;
  5. Ses interlocuteurs doivent être libres ou non d’écouter ou de recevoir son message;
  6. À quelques égards, il ne doit d’aucune façon utiliser son autorité d’employeur pour propager ses opinions contre le syndicalisme24.

Le contenu du message transmis

Dans un contexte de relation employeur-employé, les communications entre ces deux entités sont sujettes à couvrir différents sujets. C’est dans le contenu du message transmis que l’employeur est le plus susceptible de faire preuve d’ingérence et d’ainsi violer l’article 12 du Code du travail. C’est pourquoi les décideurs examineront donc en détail les conséquences du message sur la représentation syndicale25.

Les principaux sujets ayant été reconnus comme ne brimant pas le droit d’association des salariés sont : l’énumération des conditions de travail de l’entreprise26, la sécurisation des employés quant à leur avenir au sein de l’entreprise en abordant de façon neutre la campagne de sollicitation syndicale27, l’annonce du versement d’un boni lorsque le projet de donner ce boni est à l’étude depuis un certain temps28 et la lecture des articles du Code du travail, surtout ceux abordant les droits des salariés, incluant le droit d’association29, qui sont les communications les plus susceptibles d’être acceptées par les décideurs.

Quant aux principaux sujets ayant été reconnus comme brimant le droit d’association des salariés : la mise en valeur du bon fonctionnement de l’entreprise en adoptant une position antisyndicale30, l’explication aux salariés de la méthode pour démissionner du syndicat31, les menaces de fermeture d’entreprise32 et les menaces de sanctions33.

Peu importe le contenu transmis, les décideurs évalueront la preuve de la volonté de l’employeur de chercher à entraver le syndicat pour reconnaître sa culpabilité.

Les moyens de transmission du message

Les employeurs ont, à leur disposition, différents moyens afin de communiquer avec leurs employés.

Un des principaux moyens utilisés est la rencontre physique, que ce soit lors d’assemblées, de réunions etc. Les réunions hors des heures de travail ont été considérées comme légales puisque les salariés ont la possibilité de quitter s’ils le désirent34. Les réunions se déroulant durant les heures de travail ont, quant à elles, été reconnues comme étant illégales puisque l’employeur se trouve ainsi à forcer les employés à y participer35. Les réunions se déroulant sur les lieux de travail qui ne sont pas inhabituelles ont tendance à être acceptées par la jurisprudence36

En plus des réunions, la diffusion d’un enregistrement par cassette vidéo faisant état des chiffres d’affaires de l’entreprise fût considérée comme non attentatoire à l’article 12 du Code du travail.

Finalement, une lettre reçue au domicile des salariés contenant un discours antisyndical, mais dont l’opinion était soutenue, a aussi été considérée comme étant légale puisque les salariés n’ont pas d’obligation de la lire et peuvent simplement la jeter37.

L’identité du transmetteur

Dans le cadre du processus d’accréditation, l’employeur, ou ses représentants, peuvent être appelés à s’adresser directement aux salariés.

Que les communications se fassent par les plus hauts dirigeants de l’entreprise ou par l’employeur, les décideurs se prononcent rarement sur les effets que le transmetteur a sur la communication et se limitent souvent à ne mentionner que l’identité de celui-ci.

Toutefois, il serait certainement possible de mettre en preuve que la liberté du salarié d’écouter/de lire le message transmis pourra être influencée par l’importance du poste que possède le transmetteur dans l’entreprise38. Il est donc possible d’affirmer que plus le transmetteur détient un poste important dans l’entreprise, plus il devra mesurer ses propos et faire preuve de retenue39.

Comme dernière restriction, l’employeur ne peut révéler à quiconque, au cours de la procédure d’accréditation, l’appartenance d’un employé à une association de salariés40. Celui-ci doit donc faire preuve de discrétion par rapport aux adhésions syndicales puisqu’il est tenu au secret. Seuls les salariés peuvent renoncer à cette protection41.

Les sanctions

L’employeur qui enfreint l’article 12 ou l’article 13 du Code du travail commet une infraction passible d’une amende allant de 100 $ à 1 000 $ pour chaque jour ou fraction de jour que dure l’infraction42. De plus, l’employeur qui enfreint l’article 13 du Code du travail est susceptible de recevoir une plainte de pratique déloyale de travail, et ainsi de se voir imposer une ordonnance par la Commission des relations du Travail (C.R.T.) telle que43 : lui ordonner de cesser de faire, de ne pas faire ou d’accomplir un acte pour se conformer au présent code, lui exiger de réparer un acte fait en contravention d’une disposition du présent code etc.

ii. Les meilleures pratiques

a) Choisir le point de vue à adopter

L’employeur confronté à une première campagne de syndicalisation auprès de ses membres doit vite considérer ses options en tenant compte du fait qu’il pourrait vite devoir négocier une convention collective avec l’agent négociateur.

En général, les syndicats perçoivent très négativement toute forme d’enquête sur l’identité des adhérents ainsi que toute forme de communication faite aux employés par l’employeur concernant l’opportunité d’adhérer au syndicat.

L’employeur doit donc jauger et évaluer son intérêt véritable à faire échouer la démarche de syndicalisation ainsi que ses chances de succès. À cette fin, certaines informations utiles peuvent être pertinentes. Entre autres, les déclarations faites de leur propre initiative par des salariés à leur supérieur ainsi que des questions sur certains enjeux juridiques sont des indications utiles.

L’exploitation de l’entreprise, les marges de profit, le marché de la compétition ainsi que l’identité même du syndicat sont des facteurs tout aussi importants dans la décision que doit prendre l’employeur de communiquer ou de ne pas communiquer son point de vue aux salariés.

b) Plan de communication : coordonner l’action des représentants de l’employeur

Peu de gestionnaires ont une connaissance des règles de conduite de base à respecter lorsqu’une campagne de syndicalisation est en cours. D’ailleurs, dans bien des cas, il est difficile pour le gestionnaire de premier niveau de baliser ses émotions dans la période concurrente à l’annonce d’un maraudage en cours.

Dans un tel contexte, un employeur est bien fondé de gérer de façon systématique les communications faites aux employés. Certains référeront toute question ou demande de salariés, qu’ils soient sympathisants ou opposés au mouvement syndical, à un service spécialisé en relations de travail. Un membre du Barreau ou de l’Ordre des conseillers en gestion des ressources humaines agréés sera souvent à même de jouer un rôle efficace à cet égard. D’autres employeurs diffuseront à leurs cadres, et même directement aux employés de l’unité de négociation, un document incluant des questions et des réponses touchant les termes du Code du travail concernant le droit du salarié au libre choix d’adhérer ou de ne pas adhérer au syndicat, l’incidence de la signature d’une carte d’adhésion, les mécanismes de cotisation syndicale, etc.

II. Étape 2 : La requête en accréditation

i. Les règles de droit applicables

a) Le maintien des conditions de travail

À compter du dépôt d’une requête en accréditation, un employeur ne doit pas modifier les conditions de travail de ses salariés sans le consentement écrit de chaque association requérante et, le cas échéant, de l’association accréditée44. Cette obligation de l’employeur subsiste tant que le droit au lock-out ou à la grève n’est pas exercé ou qu’une sentence arbitrale n’est pas intervenue45.

La règle généralement reconnue par les tribunaux en cette matière est le gel relatif des conditions de travail. Cette règle signifie que l’employeur est tenu de maintenir les conditions de travail qui ont cours et de respecter les engagements fermes qu’il a pu prendre ou dénoncer concernant l’ajustement de certaines conditions de travail.

À ce sujet, l’arbitre Me Robert Choquette écrivait : « La jurisprudence a établi de façon unanime ou quasi-unanime que le gel des conditions de travail de l’article 59 du Code du travail en est un relatif décrit comme une approche « business as usual » qui ne suspend pas entièrement le droit de gérance en ce que l’Employeur peut continuer à gérer son entreprise en conformité avec ses politiques établies et peut y apporter les changements normaux et nécessaires à sa bonne marche. Bref, l’Employeur peut continuer à administrer normalement son entreprise durant la période visée par l’article 59 en autant qu’il puisse justifier ses décisions de façon raisonnable, l’objectif de la Loi étant d’empêcher que l’Employeur ne cherche, par le biais de modifications aux conditions de travail, à décourager l’exercice par les salariés du droit d’association ou la libre négociation de leur convention collective46. »

b) La liste des salariés

Selon l’article 25 du Code du travail, une fois que la requête en accréditation de l’association est déposée à la Commission des relations du travail, l’employeur doit, dans les cinq (5) jours de la réception de cette requête, afficher dans un endroit bien en vue la liste complète des salariés de l’entreprise visés par la requête, avec la mention de la fonction de chacun d’eux. La liste doit ainsi restée affichée jusqu’à ce que la requête soit accordée ou refusée. L’employeur doit de plus transmettre sans délai une copie de cette liste à l’association requérante et en tenir une copie à la disposition de l’agent de relations du travail saisi de la requête.

Cette étape est cruciale pour l’employeur puisqu’elle sert à déterminer le caractère représentatif de l’association requérante.

Premièrement, l’employeur devra décider quels noms d’employés ne devraient pas être inclus dans la liste des salariés au motif qu’ils sont ses représentants et non de simples salariés. En effet, l’article 1 du Code du travail exclut de la définition de salarié la « personne qui, au jugement de la Commission, est employée à titre de gérant, surintendant, contremaître ou représentant de l’employeur dans ses relations avec ses salariés ». Pour pouvoir être retirés de la liste, ceux-ci doivent, par exemple, avoir une autorité disciplinaire sur les salariés, avoir un pouvoir d’évaluation, d’embauche et de
congédiement, assister aux réunions de la direction et avoir un réel pouvoir de
gérer l’emploi de salariés46.

Ensuite, une catégorie de salariés pourra aussi être retirée de la liste, soit les salariés non-actifs (absents le jour du dépôt) ou occasionnels qui ne sont pas en réalité prochaine de prestation de travail. La « réalité prochaine de prestation de travail » se détermine en tenant compte de l’ensemble des faits pertinents à la prestation de l’employé. Certains agents de relations du travail ont développé une règle empirique appelée la règle 7/13 pour juger de l’admissibilité des salariés occasionnels47. Selon cette règle, « il s’agit de vérifier si le salarié a travaillé au cours d’au moins sept des treize semaines précédant le dépôt de la requête en accréditation »48. L’on peut donc déduire que les salariés qui ont moins de 7/13 de présence au travail sont des travailleurs occasionnels qui ne sont pas en instance prochaine d’une nouvelle prestation de travail, donc qui ne sont pas ou qui ne sont plus des salariés49.

c) L’unité de négociation

À cette étape, l’employeur doit décider s’il est, ou non, en accord avec la description de l’unité de négociation faite par l’association. Cette décision de l’employeur pourra avoir de grandes répercussions puisque la requête de l’association regroupant moins de 35 % des salariés sera automatiquement rejetée.

D’un autre côté, un accord entre les parties quant à l’unité de négociation est un élément favorisant une certaine paix industrielle50 puisque dans ce cas, l’agent d’accréditation n’a pas à se demander si l’unité est appropriée51. L’association groupant la majorité absolue de salariés aura automatiquement droit à l’accréditation, tandis que l’association réunissant entre 35 % et 50 % des salariés devra passer par le scrutin pour s’assurer de son caractère représentatif52.

En cas de désaccord quant à l’unité de négociation, l’employeur devra expliquer par écrit les raisons de son désaccord et devra proposer à l’agent de relations de travail l’unité qu’il croit appropriée53. Dans ce cas, la Commission des relations de travail, qui sera ultimement saisie du litige, n’aura pas à se demander si l’unité visée est la plus appropriée, mais simplement si elle est appropriée54. Les principaux critères sur lesquels l’employeur et l’agent doivent se baser quant à la détermination de l’unité appropriée sont, entre autres, la division territoriale ou géographique de l’entreprise, la mobilité de la main-d’œuvre et/ou de l’exécution du travail, la paix industrielle, les intérêts communs (similitude de travail et fonctions, de salaires et autres rémunérations, de conditions de travail, de métiers et de qualification, d’interdépendance et d’interchangeabilité dans les fonctions, de transférabilité et de promotion etc.)55 L’employeur qui néglige ou refuse de communiquer les raisons de son désaccord et de proposer l’unité qu’il croit être appropriée dans les 15 jours de la réception d’une copie de la requête en accréditation sera présumé avoir donné son accord quant à l’unité de négociation56.

ii. Les meilleures pratiques

a) Le maintien des conditions de travail

L’employeur ne doit pas réduire à la baisse les conditions de travail des salariés après le dépôt d’une requête en accréditation.

En règle générale, la bonne stratégie à adopter en période de négociation est de ne pas accorder de nouvelles augmentations salariales autres que celles convenues préalablement au dépôt de la requête en accréditation. De cette façon, l’employeur créera des conditions favorables pour inciter le syndicat à négocier une entente sur la première convention collective.

b) La liste des salariés

Un délai très court (5 jours) est imposé à l’employeur pour déposer sa liste de salariés.

Dans ce délai, il est fondamental de prévoir l’exclusion des employés qui sont des représentants de l’employeur. Dans bien des cas, ces exclusions sont déterminantes dans la gestion subséquente du groupe des syndiqués et dans l’application de la convention collective.

Dans certains cas, il conviendra d’allonger la liste des salariés en ajoutant ceux qui sont en absence-maladie, les remplaçants, les nouveaux embauchés et les occasionnels. Si leur nom est accepté, ceux-ci seront ainsi ajoutés au total des salariés dans le calcul de la majorité du syndicat.

Certaines règles de commodité peuvent être utiles à respecter dans la présentation de la liste. Ainsi, l’ordre alphabétique est souvent de mise pour les salariés de la même occupation et du même statut afin de simplifier l’enquête de l’agent de relation du travail.

En cas de désaccord sur certains salariés ou certains groupes de salariés, l’agent de relation du travail devra déterminer si ce désaccord a une incidence sur la majorité du syndicat. Dans le cas où le syndicat a de toute façon la majorité requise, alors il pourra accréditer le syndicat et référer le débat sur les salariés contestés au Commissaire du travail.

c) L’unité de négociation

En définitive, une approche pragmatique s’impose également à ce chapitre, l’employeur devant mesurer ses chances de réussir à faire adopter l’unité de négociation qu’il demande.

À cet égard, il peut être utile de se retrancher sur les unités de négociations classiques.

Ainsi, une unité couvrant tous les salariés est toujours valide vu le texte de l’article 21 du Code du travail. De même dans le secteur manufacturier, la distinction entre les employés de bureau et les employés de production est souvent jugée pertinente. À moindre degré, une distinction entre les unités consacrées à la recherche et au développement peut, dans certains cas, prévaloir.

III. Conclusion

La réaction de l’employeur à une campagne de maraudage est sans doute un moment important dans l’histoire des relations du travail d’une entreprise. Aussi, comme nous venons de l’illustrer, il est requis que l’employeur accorde à l’ensemble des activités s’y rapportant une attention proportionnelle, empreinte de professionnalisme et soucieuse des relations à moyen et long terme avec le potentiel agent négociateur.

Nous espérons que ces quelques observations sauront éveiller vos sensibilités afin de générer les bons réflexes, le temps venu.


1 Article 2 d) Charte canadienne (Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11).
2 Article 3 Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ c C-12.
3 Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313.
4 Lavigne c. Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario, [1991] 2 RCS 211.
5 Health Services and Support – Facilities Subsector Bargaining Assn. c. Colombie-Britannique, [2007] 2 RCS 391.
6 Code du travail, RLRQ c C-27.
7 Article 3 Code du travail, RLRQ c C-27.
8 Article 5 Code du travail, RLRQ c C-27.
9 Mitchell c. Serabjit-Singh, (1949) T.T. 294.
10 Allaire c. Cie Paquet inc., (1972) T.T. 162.
11 Article 6 Code du travail, RLRQ c C-27.
12 Meilleur c. Syndicat des employés de Gaz Métropolitain inc. (CSN), (1973) T.T. 380.
13 Article 144 Code du travail, RLRQ c C-27.
14 Article 2 b) Charte canadienne (Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11).
15 Article 3 Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ c C-12.
16 Irwin Toy Ltd. c. Québec (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 927.
17 Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 194 c. Disque Améric inc., D.T.E. 96T-835 (T.T.).
18 Article 12 Code du travail, RLRQ c C-27.
19 Article 13 Code du travail, RLRQ c C-27.
20 Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 194 c. Disque Améric inc., D.T.E. 96T-835 (T.T.).
21 ibid.
22 ibid.
23 ibid.
24 ibid.
25 Joëlle RIVET-SABOURIN, Le droit de communication de l’employeur dans les rapports collectifs du travail, Éditions Yvon Blais, 2012, p.36.
26 Syndicat des travailleuses et travailleurs Dans un jardin c. Gagnon, D.T.E. 97T-23 (T.T.).
27 ibid.
28 Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 194 c. Disque Améric inc., D.T.E. 96T-835 (T.T.).
29 Syndicat des travailleuses et travailleurs Dans un jardin c. Gagnon, D.T.E. 97T-23 (T.T.).
30 Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 194 c. Disque Améric inc., D.T.E. 96T-835 (T.T.).
31 Syndicat de la fonction publique, section locale 3894 et Ste-Anne-des-Lacs (Municipalité de), D.T.E. 2001T-68 (C.T.).
32 Association des employés de Hebdo Litho et 173438 Canada inc., D.T.E.99T-691 (C.T.).
33 Travailleuses et travailleurs unis de l’alimentation et du commerce, section locale 501 et Compagnie Wal-Mart du Canada, D.T.E. 2004T-1128 (C.R.T.).
34 Syndicat des travailleuses et travailleurs Dans un jardin c. Gagnon, D.T.E. 97T-23 (T.T.).
35 Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 194 c. Disque Améric inc., D.T.E. 96T-835 (T.T.).
36 Syndicat des travailleuses et travailleurs Dans un jardin c. Gagnon, D.T.E. 97T-23 (T.T.).
37 Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 194 c. Disque Améric inc., D.T.E. 96T-835 (T.T.).
38 Syndicat des employées et employés de soutien de l’Université Concordia et Université Concordia, D.T.E. 2007T-777 (C.R.T.).
39 Joëlle RIVET-SABOURIN, Le droit de communication de l’employeur dans les rapports collectifs du travail, Éditions Yvon Blais, 2012
40 Article 36 Code du travail, RLRQ c C-27.
41 Bureau en gros (Business Depot) c. Travailleuses et travailleurs unis de l’alimentation et du commerce, section locale 500, D.T.E. 2002T-20 (T.T.).
42 Article 143 Code du travail, RLRQ c C-27.
43 Articles 118 et 119 Code du travail, RLRQ c C-27.
44 Article 59 Code du travail, RLRQ c C-27.
45 ibid.
46 Travailleuses et travailleurs de l’alimentation et du commerce, section locale 501 et Walmart Canada (St-Hyacinthe), D.T.E. 2010 T-797
47 Syndicat des travailleuses et travailleurs de Lumi-O – CSN c. Lumi-O International inc., 2013 QCCRT 78.
48 Syndicat des travailleurs de la mine Noranda (CSN) c. Noranda Mines Limited et Les métallurgistes unis d’Amérique, section locale 4278, [1979] T.T.
49 Robert P. GAGNON, Le droit du travail du Québec, 5e édition, Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2003, p.324.
50 Syndicat des travailleurs et travailleuses du centre d’accueil Anne-Le-Seigneur, CEQ, c. Syndicat des employés et employées du service Bétournay CSN et Centre d’accueil Anne-Le-Seigneur, (1990) T.T.
51 Pavillon des Jeunes inc. c. Union des employés de service local 298 (FTQ), (1979) T.T. 266.
52 Association des professionnels non enseignants du Québec c. Association des professionnels de l’orientation du Québec, (1975) T.T. 158.
53 Articles 21 et 28 b) Code du travail, RLRQ c C-27.
54 Article 28 c) Code du travail, RLRQ c C-27.
55 Travailleuses et travailleurs unis de l’alimentation et du commerce, section locale 500 c. Marché Port-Royal inc., D.T.E. 2009T-504 (C.R.T.).
56 Syndicat national des employés de Sicard (CSN) c. Association internationale des travailleurs de métal en feuilles, (1965) R.D.T. 353 (C.R.T.).
57 Article 28 c) Code du travail, RLRQ c C-27.

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